L’auteur du fabuleux Underwater Cities, Vladimir Suchý, revient aux commandes de Praga Caput Regni, un nouveau jeu expert qui tente de retracer l’histoire de sa ville natale de Prague.
Annoncé pour 1 à 4 joueurs, le nouvel opus de Delicious Games invite à jouer entre différents types d’actions autour des bâtiments historiques et emblématiques de la ville à l’époque du roi Charles IV. Jeu historique ou « euro game » simplement thématisé ?
Praga Caput Regni, en bref : je retire une tuile de la grue du plateau central afin de réaliser l’une des deux actions indiquées. Ainsi, au fil des tours je vais devoir choisir entre améliorer mes actions, faire évoluer mes capacités de production d’or et de pierre, progresser sur la Route Royale jusqu’au Pont Charles, avancer au sein de la Cathédrale St Vitus ou au pied du Mur de la Faim ou encore construire des bâtiments… Chacune de mes actions sera mesurée pour les points rapportés en fin de partie ou simplement les bonus immédiats et nécessaires pour la suite.
Le matériel de Praga Caput Regni
La boîte de Praga Caput Regni pèse son poids et la petite dizaine de planches carton annonce d’entrée quelques longues minutes de « dépunchage ».
Parmi les pièces à découper, il y a également un atelier construction à prévoir pour assembler la Cathédrale, le Mur et le Pont (montage en 3D), préparer les plateaux joueurs double couche et installer les roues grues sur ces derniers et sur le plateau principal.
Au final, vous vous retrouvez avec des tonnes de tuiles :
- 30 tuiles Amélioration
- 36 tuiles Bâtiment
- 36 tuiles Mur
- 24 tuiles Technologie
- 12 tuiles Pont
- 11 tuiles Places
- 6 tuiles action…
Sans compter les tuiles alternatives pour varier le jeu et plus de 80 jetons de toutes sortes…. Ce sera tout ? Non, il y a tout de même quelques pièces en bois : des cubes, des disques et des pions !
Une fois tout posé sur la table, quelques questions se posent : est-ce que tout rentrera dans la boîte ? Faudra-t-il tout démonter à chaque partie comme c’est le cas dans certains jeux ? Oui et non. Tout rentre (au chausse-pieds et en échange d’une certaine organisation à base de sachets plastiques fournis) et les bâtiments en 3D restent montés (il est même conseillé de les coller au montage).
Le plateau principal est immense, coloré et richement illustré par Milan Vavroň. La bonne idée vient du fait que les bâtiments en cartons sont facultatifs car déjà imprimés sur le plateau pour ne pas gêner la vue du plateau si vous êtes à 4 autour de la table. Suchý nous emmène dans un univers graphique radicalement différent d’Underwater Cities, parfaitement en accord avec le thème.
Pour parfaire la livraison, le livret de règles est très largement fourni en exemples visuels et se parcoure avec plaisir et fluidité. Petit détail appréciable : une page est consacrée brièvement à l’histoire du roi Charles IV et des différents bâtiments historiques représentés utilisés dans le jeu. Le seul défaut que l’on peut trouver se situe au niveau de la traduction littérale (à voir si la règle de la version boîte est différente de celle mise à disposition par Delicious Games) qui écrit « Cathédrale St. Vitus » au lieu de « Cathédrale St Guy » que l’on trouve dans les livres d’Histoire français .
Côté matériel, Praga Caput Regni fait carton plein dans tous les sens du terme !
Praga Caput Regni : thème ou thème pas ?
« Charles IV a été couronné roi de Bohême et souverain du Saint- Empire romain. Depuis son château de Prague, il supervise la construction de nouvelles fortifications, d’un pont sur la Vltava, d’une université et d’une Cathédrale se dressant dans l’enceinte même du château. Prague compte déjà parmi les plus grandes villes d’Europe. Le roi Charles en fera la capitale d’un empire ! »
En tant que riches citoyens de la ville de Prague, vous allez participer aux différentes constructions qui vous attireront les faveurs du Roi payées sous forme de points de victoire. Loin d’être plaqué et sans être complètement immersif, le thème de Praga Caput Regni est bien utilisé tout au long de la partie pour ne pas faire un jeu un simple mix de mécaniques techniques.
L’exercice d’un thème fort associé à un jeu de type « euro » est périlleux mais l’auteur a su aller au bout de la démarche et proposer une expérience intéressante. Il ne manque que les billets d’avion pour la Capitale tchèque !
Mise en place d’une partie de Praga Caput Regni
Malgré la quantité de matériel, si vous avez bien séparé les différents éléments, la mise en place est assez rapide.
Chaque joueur reçoit un plateau d’action et un plateau joueur puis y place ses cubes dans les découpes prévues à cet effet. Du côté du plateau principal, chaque joueur égrène quelques cubes et pions du côté de la Cathédrale St Vitus, du Mur de la Faim et au début de la Route Royale.
Les 6 tuiles actions sont déposées aléatoirement sur les premiers emplacements de la grue principale, les tuiles Ponts sont posées à l’une de ses extrémités et une 3+1 tuiles de chaque type de tuile hexagonale sont mis à disposition. Tout le reste est placé autour du plateau pour que les joueurs y accèdent en fonction de leurs gains ou des besoins de recharger les différentes réserves.
Rien de bien long ni complexe, à condition d’être organisé et de ne pas avoir fait le choix d’économiser les sachets plastiques !
Le principe de jeu dans Praga Caput Regni
A son tour chaque joueur réalise une action principale parmi celles à disposition sur la grue d’action en prenant la tuile qui correspond à son souhait et s’il peut la payer (les tuiles les plus récemment remises à disposition sont les plus chères tandis que d’autres rapportent quelques points de victoire pour avoir été délaissées).
Six actions et bien plus encore…
Les actions principales, présentes sur le plateau d’action hexagonal de chaque joueur, peuvent être améliorées pour offrir un bénéfice lorsqu’elles sont réalisées :
- Gérer les mines d’or / les carrières de pierre : augmenter sa capacité de production ou produire la ressource concernée.
- Améliorer une action : prendre une tuile d’amélioration disponible et la placer sur son plateau d’action pour gagner le bénéfice aux prochaines utilisations de cette action.
- Construire un mur : acheter et placer une tuile mur autour du plateau d’action pour son bénéfice immédiat et éventuellement des bonus d’adjacence avec les murs déjà placés.
- Construire un bâtiment : acheter et placer une tuile bâtiment sur le plateau principal (autour des places) et récolter des points immédiats ou se positionner pour gagner le bonus de la Place entourée.
- Construire la Route Royale : faire avancer son pion pour un bénéfice immédiat au choix parmi 4 dont 2 coûtent des oeufs.
En sus, deux actions « permanentes » permettent d’imaginer des combos en échanges de jetons « vitrail » qui servent à grimper les étages du Mur ou de la Cathédrale ou à réaliser une action supplémentaire « gratuite ». Malgré tout, l’auteur pose une contrainte forte à cela : vous ne cumulerez pas plus de 2 vitraux en fin de tour, vous obligeant à les utiliser sous peine de les perdre. L’idée est excellente car elle dynamise le jeu face à des joueurs qui adopteraient un comportement attentiste !
Points d’actions…
La profondeur de Praga se révèle dès que l’on réalise que les actions ci-dessus ont bien plus d’implications que les simples gains immédiats. Par exemple, certaines de ces actions permettent de faire avancer ses marqueurs sur le Mur de la faim ou à la Cathédrale pour prendre des points de victoire de fin de partie ou augmenter des multiplicateurs de points.
Finalement, chaque choix d’action devra être finement réfléchi pour alimenter votre stratégie et le(s) moteur(s) de points qui en découle(nt). Inutile de préciser que la première partie pourra sembler compliquée devant tant de choix et la difficulté à mesurer leur efficacité sur le long terme vis à vis du score final !
Difficile ici de mettre en lumière toutes les actions et leurs conséquences, leurs bonus et ce qui sera le plus pertinent de faire… En omettant les tuiles alternatives offertes pour augmenter la rejouabilité, vous aurez quelques parties à faire pour découvrir l’étendue des possibilités en matière de stratégie.
La roue tourne… va tourner
Une partie de Praga Caput Regni se déroule en 16 tours. Cependant, le nombre de tours qu’effectuera la grue du plateau principal varie en fonction du nombre de joueurs grâce à un système très malin de cube qui vient bloquer la grue d’action. Quand ça bloque, vous êtes invité à faire progresser le marqueur d’étapes vous rapprochant d’un changement intermédiaire de toutes les tuiles (amélioration, mur et bâtiment) pour des versions plus « rentables ».
Le temps est ainsi compté et incite à améliorer ses actions pour rentabiliser vos choix de tuile à chaque tour de jeu.
Nombre de tours limité signifie également ressources tendues : perdra-t-on le temps de produire ou restera-t-on sur le fil grâce au mince octroi d’une ressource lors de l’action d’amélioration de la production ?
Interaction et rejouabilité
Côté interaction, Praga Caput Regni travaille dans l’indirect : à part piquer une tuile ou un emplacement sous le nez des adversaires, il y aura peu de contraintes et de contre-jeu possible.
Niveau rejouabilité, Praga Caput Regni propose des tuiles pour modifier les étages du Mur et de la Cathédrale, des tuiles à placer sur la Route Royale pour varier les plaisirs à collecter pendant la promenade et des tuiles actions double-face !
Si l’on prend en compte le nombre de tuiles disponibles et qui ne seront pas toutes utilisées à chaque partie, Praga Caput Regni vise la plus haute marche sur cet aspect !
Et Praga Caput Regni, à deux ?
Comme à 3 ou 4 joueurs, Praga Caput Regni adapte le nombre de tours de roue et s’équilibre très bien. Le nombre de Places où construire les bâtiments est réduit et quelques bâtiments sont placés d’office pour vous assurer de ne pas perdre du temps à construire sans arrêt pour compenser le manque de compagnons de jeu.
Le jeu en duo est très bien équilibré et l’interaction déjà limitée n’est pas pour autant réduite à peau de chagrin comme cela peut souvent être le cas. Les sensations à 2 sont identiques à celles d’un jeu avec plus de convives.
Finalement, Praga Caput Regni…
Dès l’ouverture de la boîte, Praga Caput Regni fait forte impression : quantité et qualité du matériel… Mais à la fin de la première partie, l’envie d’y revenir est très forte grâce à l’alchimie entre profondeur de jeu et simplicité des actions à disposition.
Praga Caput Regni offre un fond d’histoire discret pour justifier son contenu et lui donner tout de même une âme là où beaucoup de jeux plaquent bêtement un thème pour coller au titre ou aux choix artistiques. C’est plutôt appréciable !
Pour finir de séduire, la reconstruction de la ville de Prague délivre sans extension une forte rejouabilité tant par le matériel complémentaire que par les options stratégiques. Trop rare !
Comment ranger Praga Caput Regni ?
La quantité de matériel à classer par type, par âge et la variété des composants rendent le rangement et la mise en place plutôt fastidieux. Si vous séparez « logiquement » la plupart des éléments vous vous retrouverez avec plus d’une vingtaine de sachets plastiques à caler autour des constructions en carton. Rien d’infaisable mais nous avons préféré concevoir notre propre système de rangement à base de carton plume.
Un casier permet de ranger toutes les tuiles hexagonales par type et par âge et un autre stocke le reste des tuiles/jetons en carton ainsi que le Pont Charles.
Nous avons même exploité les fondations du Mur et de la Cathédrale pour y placer les casiers de matériel des joueurs !
Règles de Praga Caput Regni
Télécharger “Praga Caput Regni, les règles”
Praga-Caput-Regni.pdf – Téléchargé 894 fois – 28,37 MoPour les amoureux du mode solo, nous avons également traduit les règles complémentaires et proposé une app pour Praga Caput Regni.