Bitoku, notre avis

Esprit es-tu là ?

Infos jeu

  • Expert
  • Placement d'ouvriers, collection de cartes
  • 1 à 4
  • 14+ ans
  • 60-90 min
  • Germán P. Millán
  • Meeple Foundry
  • septembre 2022
  • 60 €

Nos notes

Prise en main
Rejouabilité
Matériel
Interaction
Indispensable

En général je ne suis pas très client des jeux aux thèmes « japonisants » et aux plateaux « ultra-chargés » mais étant donné le bruit qu’a fait Bitoku (anglophone) à sa sortie en 2021 m’a suffisamment intrigué pour que je lui donne sa chance. Tout dernier arrivé de la gamme « iello Expert », Bitoku joue sur la corde sensible du placement d’ouvrier à base de dés, de la gestion de main et d’un solo de David Turczi : autant d’ingrédients qui pourraient en faire une réussite ?

Précisons-le tout de suite, le titre se prononce « Bit-o-kou » et contrairement aux Ruines perdues de Narak, iello assume la localisation du titre sans changement par respect pour le thème du soleil levant !

Bitoku, en bref : Le grand esprit de la forêt est en fin de règne (non il ne s’appelle pas Elizabeth) et il est temps d’élire le nouveau Grand Esprit qui lui succèdera. Pendant 4 années, découpées en 4 saisons, je vais jouer en deux temps en invoquant un Yokaï qui m’octroie un bonus et libère un de mes ouvriers qui partira ensuite se promener en forêt pour construire des bâtiments, récupérer des ressources ou différents types de bonus plus ou moins immédiats.

Le matériel de Bitoku

Derrière la très belle image de couverture de la boîte se cache une tonne de matériel… Bitoku fait dans la démesure pour son prix avec plus de 150 tuiles, plus de 170 pions en bois (ressources comprises) et plus d’une centaine de cartes…

Ajoutez à cela un plateau principal double couche pour y insérer les modules spécifiques aux nombres de joueurs attablés, de grands plateaux personnels, de jolis dés transparents et colorés… vous allez passer un certain temps à le déballer et à vous émerveiller devant ce contenu pléthorique !

En dehors du nombre d’éléments, il faut également noter l’effort fait sur les ressources en bois découpé, les pions joueurs différenciés par leur forme et leur couleur et quelques pièces en bois parés d’une impression colorée qu’on aurait aimé retrouver sur l’ensemble du matériel de joueur.

Le livret de règles est dense et les aides de jeu (4 pages) fournies sont aussi utiles que bien conçues. Malgré leur densité les règles sont plutôt claires et bien organisées (heureusement !) et saupoudrées de descriptions thématiques à chaque page pour mieux poser le thème.

Bitoku : thème ou thème pas ?

« Il y a bien longtemps, du temps de nos ancêtres, à une époque oubliée par l’humanité, un grand esprit habitait une immense forêt. Sa seule présence imprégnait toute chose de vie et assurait l’abondance et la paix. Une fois révolu le temps qui lui était imparti, le grand esprit s’en allait pour ne plus jamais revenir. Un esprit vertueux digne de prendre sa place, appelé Bitoku, était alors élu pour continuer à préserver l’harmonie de la forêt. » 

Dans le livret de règles, chaque nouveau concept de jeu fait l’objet d’une mise en situation thématique, chaque élément de jeu possède sa propre dénomination associée à son rôle et au folklore japonais qui habille le jeu. L’univers est onirique, inventé de toutes pièces en mêlant différentes inspirations rappelées en fin de règles mais s’avère cohérent et agréable.

On ne peut pas parler totalement d’un jeu thématique comme le serait un Pax Pamir (ou même un Trickerion pour rester dans le placement d’ouvriers), mais si vous faites l’effort d’employer les termes précis de chaque élément,t et d’expliquer le jeu dans son univers, le thème sera suffisamment présent pour faire abstraction d’un pur combo de mécaniques.

Mise en place d’une partie de Bitoku

Pour installer votre partie de Bitoku, si vous n’avez pas (encore) opté pour un insert adapté ou la solution de petits sacs en tissu pour y fourrer les tuiles, il faut s’armer de patience…

Le plateau est double face (solo/2 joueurs vs 3-4 joueurs) et nécessite d’y insérer de grandes tuiles qui définissent le nombre d’emplacement disponibles (en fonction du nombre de joueurs).

C’est la tuile…

Ensuite vient le mélange et la création de petites piles de tuiles : les Trésors du lac, les Cristaux, les Mitama, les Libellules, les Rochers…
Sans solution de rangement type casiers pour les tuiles ou petits sacs opaques, la pose des dizaines de tuiles en de multiples piles est l’opération la plus fastidieuse de la mise en place d’une partie de Bitoku.

Et le reste…

Pour la suite, quelques cartes à mélanger et à distribuer (objectifs, Yokaï, Bitoku et cartes de départ) avant d’installer les plateaux joueurs sur lesquels viennent se poser des pèlerins (endormis ou pas), les dés et les bâtiments ainsi que les ressources et tuiles de départ !

Le principe de jeu dans Bitoku

La partie de Bitoku se déroule au fil des saisons et des années. À chaque saison, les opérations alternent entre collecte de cartes et de ressources (Printemps), actions à réaliser (Été), modification éventuelle de l’ordre du tour (Automne) et grand ménage en vue de la manche l’année suivante (Hiver).

C’est la jungle !

Bitoku fait partie de ces jeux au plateau intimidant : certes très joli, celui-ci est bardé de zones d’action, d’emplacements divers et variés et de choix pas évidents au premier abord. Par quoi commencer ? Où aller ? Pour quoi faire ? Autant de questions qui vont vous embrouiller le neurone et pourraient même décourager d’entrée.

Pourtant, avec un peu de concentration et d’étude des éléments de jeu et de leur imbrication, tout se met en place et devient fluide. Il faut que celui qui explique le jeu ait déjà joué ou a minima mis en place une partie et essayé quelques tours de piste pour aiguiller les joueurs et les accrocher… Une fois cette barrière levée, tout ira bien et les combos/bonus à construire récompenseront cet investissement de temps et de patience.

Sans refaire les règles, voici « rapidement » les grands principes d’une partie de Bitoku.

Cartes à jouer

Chaque tour de jeu est piloté par les 3 cartes Yokaï choisies individuellement par les joueurs et qui permettent à la fois de débloquer les dés (vos ouvriers) et de réaliser immédiatement une action. Sans carte posée pas d’ouvriers envoyées en promenade dans la forêt : il faut donc soigneusement choisir des cartes qui prépareront efficacement la suite du tour.

Les cartes Yokaï de départ ne sont pas très puissantes, mais vous allez en collectionner d’autres soit pour les remplacer par une version améliorée soit pour diversifier vos actions bonus. Notez qu’en fonction de certaines tuiles que vous irez chercher, vous pourrez trouver un intérêt à vous spécialiser dans des types de cartes Yokaï.

Trois cartes Yokaï à chaque manche saison, c’est peu et invite donc à faire les « bons » choix très tôt dans la partie. Elles ne reviendront que difficilement en main plus tard !
N’oubliez pas qu’à votre tour, vous pourrez soit poser une carte Yokaï soit envoyer un ouvrier en forêt…

Cet aspect de temporisation est primordial car vouloir débloquer ses ouvriers avant de les utiliser peut laisser une opportunité aux adversaires de bloquer temporairement voire définitivement une action envisagée !

Dés ouvriers

La principale mécanique en œuvre dans Bitoku est le placement d’ouvriers représentés par des dés. Un peu comme dans Teotihuacan, leur valeur a un impact sur la force de l’action réalisée et partir à la chasse aux amulettes offrira de les renforcer encore un peu. Par la suite, un ouvrier installé dans une clairière de la forêt décidera de traverser le Rubicon la rivière en y laissant un peu de sa force !

À l’instar du concept de déblocage/utilisation des ouvriers en deux temps, les dés posés sur le plateau traverseront plus ou moins vite la rivière au risque, à nouveau, de se voir piquer la bonne opportunité sous le nez.

Honnêtement, je ne m’attendais pas à un tel niveau d’interaction dans Bitoku mais, quel que soit le nombre de joueurs, l’auteur a réussi à forcer l’interaction entre adversaires avec le timing et le blocage des emplacements. Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai fait un sitting dans une clairière pour empêcher un autre joueur de s’y poser pour ensuite tranquillement traverser la rivière et l’obliger à revoir la stratégie de sa manche ! Diabolique !

Bâtiments, Kodamas, tuiles, cartes, chemins : bonus en tous genres

Pour le reste du jeu, vos actions d’ouvriers ou de Yokaï tourneront autour de :

  • la construction de bâtiments pour créer de nouvelles zones d’actions (et engranger des bonus quand les autres joueurs les utilisent) et faire progresser le Kodama de la région qui récompense le plus avancé en fin de partie
  • le ramassage de tuiles diverses qui offriront des bonus immédiats, différés, par combinaison ou en fin de partie…
  • la collection de cartes Yokaï ou Bitoku pour varier vos actions ou préparer une randonnée initiatique.
  • la promenade sur les chemins de la Sagesse (partagé entre tous) ou Bitoku (personnelle, à base de cartes éponymes)

J’avais prévenu, il y en a partout, de multiples manière de faire des points immédiats ou de fin de partie sans compter les choix d’actions cornéliens pour être le premier ou freiner les autres. Bitoku est un jeu riche, complet, varié et qui se bonifie au fil des parties en se révélant moins complexe qu’au premier abord. On reste quand même sur « du jeu expert » même si je n’aime pas l’appellation un peu clivante.

Et Bitoku, en solo ?

Bien conçu pour s’adapter au nombre de joueurs (trop rare pour ne pas le signaler), Bitoku est livré avec un mode solo signé de l’incontournable David Turczi qui vaut le détour.

L’expérience solo n’est pas une bête course aux points sans âme mais bien un défi contre un adversaire réactif. Le Tengu, votre adversaire maléfique virtuel, dispose de son propre plateau et se pilote avec un « cycle d’activation » qui n’est rien d’autre qu’un tableau de conditions/conséquences.

Franchement, ce n’est pas compliqué à utiliser mais c’est loin d’être sexy et, absent des aides de jeu, ce logigramme au format Excel nécessite de garder la règle ouverte pour le consulter. Et ça, ça freine énormément l’envie de jouer seul.

Solo à la carte

Frustré par la qualité intrinsèque du mode solo et son tableau rebutant, je me suis lancé dans la création d’un petit deck de cartes qui permet de faire défiler les options du Tengu en mode visuel et/ou texte.

Et sincèrement, cela change tout. Règles fermées, quelques cartes en main, la gestion de l’adversaire automatisée devient plus fluide, plus évidente et rend enfin justice à un mode solo intéressant !

Télécharger “Bitoku, cartes mode solo”

Bitoku-Solo-Cards-FR.pdf – Téléchargé 1557 fois – 1,87 Mo

Finalement, Bitoku…

Germán P. Millán et Devir signent un premier gros jeu qui peut freiner les ardeurs si on s’arrête au plateau un peu fouillis de prime abord et à la longueur du livret de règles. Pourtant, une fois cette carapace retirée, Bitoku est un petit bijou d’optimisation, de salade de points, de stratégie et d’interaction.

L’excellent équilibrage en fonction du nombre de joueurs permet de le sortir aussi bien seul qu’avec 1, 2 ou 3 compagnons de jeu.
iello confirme ici ses excellents choix pour sa cuvée de la gamme expert !

Règles de Bitoku

Télécharger “Bitoku, règles du jeu”

Bitoku.pdf – Téléchargé 1097 fois – 24,68 Mo

Publications récentes

Ben
Ben
Tout est parti d'un Carcassonne sur iPad... la tuile... car depuis les jeux de plateau sont devenus plaisir et passion du quotidien. En charge de la zone "expert" et "jeux cultes" de la collection. Références : les jeux de Stegmaier et Shem Philipps.

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En général je ne suis pas très client des jeux aux thèmes « japonisants » et aux plateaux « ultra-chargés » mais étant donné le bruit qu’a fait Bitoku (anglophone) à sa sortie en 2021 m’a suffisamment intrigué pour que je lui donne sa chance. Tout dernier arrivé...Bitoku, notre avis